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Quel avenir pour la démocratie participative municipale ?

La « démocratie participative » est ici entendue au sens extensif de l’ensemble des outils permettant d’associer de près ou de loin les habitants à la décision publique, sans préjudice du point de savoir si les habitants ne font que discuter entre eux ou bien décident réellement. Autrement dit, pour reprendre une définition de Loïc Blondiaux, le terme désigne

En quelques points

Date

19 avril 2024

Auteur

Camille Morio, Maîtresse de conférences en droit public à Sciences Po Grenoble et chercheure au CERDAP2

tout ce qui, dans la vie politique des démocraties contemporaines, ne relève pas strictement de la logique du gouvernement représentatif

Loïc Blondiaux

Une démocratie participative locale très consultative mais étouffant la décision et l’initiative citoyenne

L’analyse montre que la démocratie participative au niveau de la commune est actuellement très porteuse de délibération, à travers les différents conseils et comités existant, et riche en mesures permettant aux personnes élues d’enrichir la décision publique des avis émis par les personnes non élues. Au contraire, elle n’encourage pas voire étouffe les dimensions décisionnelles et d’initiative citoyenne. Les cas le plus flagrants sont ceux de la pétition et du référendum local

Dès lors, la participation observée est souvent en demi-teinte : parfois une démarche participative va réunir une diversité et / ou un nombre élevés de personnes, se dérouler dans des conditions d’échange et d’écoute et déboucher sur une véritable co-construction d’un projet ou d’une politique publique. Parfois au contraire de véritables difficultés sont relevées, que cela soit sur le plan quantitatif ou qualitatif. A côté de cela, on observe le développement de procédures plus originales ou ad hoc, telles que les budgets participatifs ou les conventions citoyennes[1].

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Demander si « cela prend côté citoyens et citoyennes » constitue peut-être déjà une partie du problème

Toutefois, demander si « cela prend côté citoyens et citoyennes » constitue peut-être déjà une partie du problème, dans un contexte où l’offre publique actuelle est orientée principalement sur la consultation. Comme le soulignent Guillaume Gourgues et Sandrine Rui, la participation en demi-teinte à « l’offre publique de participation » n’est pas nécessairement le signe d’un désintérêt pour les questions politiques :

il faut rappeler […] les appels aux boycotts, les dénonciations publiques et les recours dont font l’objet les dispositifs. Celles et ceux qui pénètrent dans les dispositifs le font avec beaucoup de scepticisme et sans grande illusion, et ne sont pas les idiot·es utiles de la grande supercherie participative [sic]. […] Celles et ceux qui ont expérimenté les formes institutionnelles de participation en sortent souvent écœurés et défiants, sentiments qui aiguisent leur capacité critique ».

Antoine Bézard aborde une idée proche lorsqu’il écrit, à propos des budgets participatifs :

la question de la participation est régulièrement posée par les observateurs sous l’angle du nombre. […] La question posée par les citoyens est celle de ces résultats, des changements que leur participation produit

Il s’agit alors de faire un pas de côté : comment l’offre publique de participation peut-elle mieux intégrer l’enjeu de l’influence, voire de la décision, provenant des citoyens sur la décision publique ? Et comment peut-elle mieux s’articuler avec l’initiative citoyenne, y compris sous sa forme contestataire ?


Conforter la consultation et faire une véritable place à la décision et à l’initiative citoyenne

Les communes (voire les quartiers, pour les grandes villes) de demain se démarquent par la proximité entendue au sens de facilité de sociabilité. C’est ce qui continue de les distinguer des autres échelons d’entités publiques locales, dans un cadre territorial qui sera probablement remanié. Elle est l’échelon où les personnes se côtoient au quotidien, mais elle n’est pas l’échelon de toutes les politiques publiques. A son niveau, elle peut déjà être le siège d’une vie démocratique plus vivante. Elle peut également constituer une porte d’entrée vers la diversité de chemins participatifs existant, tant à son niveau qu’à l’échelle des autres entités locales.